Cecilia et Guillermo

La Mariota

Cecilia et Guillermo

La Mariota

« On se retrouve dans les vignes, je t’envoie le point GPS parce que sinon, tu trouveras pas…» m’a dit Guillermo. Effectivement. Merci la technologie parce que oui, je n’aurai probablement pas trouvé…et ça aurait été bien dommage parce l’endroit est sublime. Nous sommes au lieu-dit Bac de la Coves, situé sur la commune de Tautavel, dans le Roussillon. Une quinzaine de kilomètres au Nord Ouest de Perpignan, grosso-modo au centre d’un triangle composé des villages de Latour-de-France, Vingrau et Calce. C’est là que tout a commencé pour Cécilia et Guillermo. Enfin, c’est plutôt là qu’a commencé leur aventure de vigneron puisque le vrai début pour eux deux, ça se passe plutôt au début des années 2000, à Majorque, où ces deux expatriés argentins se rencontrent pour la première fois. Ce n’est qu’un (long) tour d’Europe plus tard (qui les emmènera à Cannes, Geneve, Londres et Paris notamment) qu’ils posent, pour de bon, leurs valises en Catalogne Nord. Nous sommes en 2017.

C’est dans les nombreux hôtels et restaurants dans lesquels ils ont travaillé (avec pas mal d’étoilés), que, à force de dégustations et de découvertes, la passion du vin les a attrapé. Ils commencent avec seulement 1,7 hectares de vignes, dont ils s’occupent le soir et le WE. Guillermo se forme chez les frères Danjou-Banessy (on pourrait plus mal tomber…) tout en suivant un BTS viti-oeno pour avoir le socle « technique ». Ils achètent chaque année une nouvelle parcelle ou deux. C’est en 2022 qu’ils s’installent « réellement », à temps plein en tout cas, sur 8 hectares.

Au sommet du Bac de la Coves

Le Bac de las Coves (là où tout a commencé, vous vous souvenez?) c’est un ensemble d’un peu moins de 2 hectares regroupant plusieurs parcelles séparées par des haies ou des bosquets et où les vignes ont d’une dizaine d’années à plus de cent ans. L’appellation Maury est à quelques centaines de mètres. Pas moins de 6 cépages cohabitent ici (c’est un point très positif pour démarrer) : Muscat (petit grains et surtout d’Alexandrie), Grenache (blanc et noir), Carignan et Mourvèdre. La géologie du lieu est, elle aussi, extrêmement intéressante. Nous sommes principalement sur les schistes mais le massif des Corbières (essentiellement calcaire) est vraiment tout proche si bien que l’on se retrouve à un point de rencontre entre deux grandes unités géologiques, des zones qui en général offrent de grands terroirs viticoles (c’est par exemple exactement la même configuration chez Rié et Hiro, au domaine Pedres Blanques)

Le Grenache blanc avec les Corbières qui démarrent en arrière plan

Si vous avez été observateur, vous avez déjà remarqué que les sols présentent un joli couvert végétal. C’est une volonté de Cécilia et Guillermo de ne pas avoir de sols nus pour l’hiver si bien que des engrais verts sont même parfois semés, lorsque nécessaire, à l’automne. Mais dès que le printemps arrive, ces couverts sont détruits/enfouis pour passer la saison estivale. L’année 2022 a marqué un tournant dans la région, avec un manque d’eau qui a atteint des niveaux inconnus et inimaginables. Le cumul de précipitation n’a pas dépassé les 200mm sur l’année, une valeur équivalente à celle des plaines désertiques du Sahara. Dans ces conditions, l’accès à l’eau est le critère primordial pour la vigne et même si les engrais verts permettent d’abaisser les températures au sol (jusqu’à 10°C), même si leur cycle de floraison est décalé (ils sont choisis notamment pour avoir besoin d’eau plus tôt dans la saison que la vigne), la contrainte hydrique est devenue tellement extrême que la présence d’un couvert végétal qui va venir concurrence la vigne pour l’eau, est impossible. Les sols sont donc entièrement travaillés. Evidemment, tout le travail dans les vignes se fait suivant le cahier des charges de l’agriculture biologique avec une utilisation seulement de produit de contact (soufre, cuivre) en quantité très réduite.

La très grande partie des autres parcelles est située sur la commune de Vingrau (c’est aussi là que se trouve le chai, collé à leur maison). Une partie des vignes est située sur les plateaux (on monte jusqu’à 400m d’altitude ici) et l’autre, sur les pentes (parfois abruptes), du plutôt (très) connu (en tout cas remarquable géologiquement) Cirque de Vingrau. Ici, il n’est pas question de schistes, on est totalement sur le calcaire. D’ailleurs, contrairement à nombre de vignerons qui assemblent les deux terroirs, chez Cécilia et Guillermo, les vins sont « soit de schistes, soit de calcaire ». Un axe fort de leur démarche.

Schistes….
Calcaire…

Seul exception, Orange Tacsum, le vin de macération du couple, qui assemble à la fois les deux terroirs et aussi, deux variétés de muscat. Le Muscat d’Alexandrie vient du Bac de las Coves et le Muscat petit grain vient de Vingrau. J’ai particulièrement échangé avec Guillermo sur ce vin, que je trouve hyper intéressant (et aussi hyper bon accessoirement, alors que je ne suis fan ni des vins oranges, ni du Muscat en général…). Le Muscat d’Alexandrie, un cépage qu’ils aiment beaucoup, est là pour son aromatique noble et profonde, loin des aromatiques du Muscat « classique » que tout le monde connait (le « fruité » du muscat me dira-t-il avec un petit sourire). Le Petit Grain lui est vendangé légèrement en sous maturité (pour « éteindre » son aromatique) et limiter ainsi son apport à la structure, la trame, calcaire et saline. C’est d’autant plus intéressant qu’il provient effectivement d’un terroir calcaire…

Le Muscat d’Alexandrie du Bac de las Coves

Autant (et à l’image de cet Orange Tacsum) on sent chez Cécilia et Guillermo une vraie réflexion et un vrai cheminement dans la création de chaque cuvée, autant le travail en cave n’a rien de particulièrement novateur/extravagant. C’est un constat que je pourrais faire pour pratiquement tous les vignerons présents dans la sélection, une constante revendiquée par eux même d’ailleurs, dans pratiquement tous les cas. En une phrase, rentrer en cave les meilleurs raisins possibles pour ensuite les accompagner, avec soin, là où ils décideront d’aller. Les vinifications dans le petit chai de Vingrau sont donc les plus naturelles possibles : pas d’intrant hormis parfois un peu soufre, des levures indigènes, pas de filtration, de longs élevages pour bien poser les vins (avec une partie en bouteille, une pratique devenue très rare). Naturel mais pas Rock’n’Roll, cadré, gastronomique (un critère primordial pour le couple qui a navigué dans la grande restauration pendant des années).  Pas de « glou-glou » non plus, ce qui ne signifie pas forcément des matières imposantes et denses (plutôt le contraire même), mais des vins avec du fond, des tactiles suaves, des aromatiques nobles, des finales salines (un mot qui revient souvent dans la bouche de Guillermo). Une bonne partie des vins passent, au moins partiellement, sous bois. Les tonneaux (majoritairement des 400L ou plus) sont achetés au gré des opportunités, avec pas mal d’essais et sans dogme (ils sont ouverts aux choses nouvelles) mais toujours auprès de sources de qualité (Rousseau, Stockinger, Tonnellerie de Mercurey…)

Ils viennent juste de troquer leur petit pressoir vertical cage bois pour un pressoir pneumatique. « Pour les blancs, c’est quand même un autre monde » me dit Guillermo. En terme de précision, mais aussi de rendement. Avec le cage bois avec lequel ils ont commencé, ils leur fallait grosso-modo 200kilos de raisins pour faire 100L de jus (ça reste très variable suivant les années…). Avec le pneumatique, ils n’ont besoin que de 140-150 kilos. Alors quand tu as déjà des petits rendements (moins de 20hecto/ha) et que tes raisins sont de super qualité, on peut comprendre que ça fait mal au coeur (voire un peu plus bas…) de laisser 1/4 de ton volume de vin dans le pressoir en pur perte…Toujours dans cet objectif de précision, ils ont choisi le plus petit modèle qui existe (8hecto seulement). En contrepartie, c’est très long et c’est énormément de travail (en 2022 il ont fait 35 pressoirs par exemple (il faut le laver entièrement à chaque fois…)) mais ça vaut le coup !

Ce n’est pas très à la mode ni porteur mais ils souhaitent (et le font déjà d’ailleurs) travailler une partie des vins sur le mode « oxydatif ». Déjà parce que c’est dans l’ADN du Roussillon, de faire de grands vins oxydatifs et qu’ils veulent contribuer à préserver ce patrimoine mais aussi parce que d’un point de vue purement gustatif, ils trouvent ça super intéressant. Il n’y a aucun mutage chez eux mais ils expérimentent beaucoup sur des grenaches vendangés à haute maturité (16°, voire plus) avec lesquels ils alternent des périodes de ouillage et de non-ouillage. Pas des oxydatifs au sens strict du terme donc mais plutôt une recherche de vieillissement, de complexité, d’aromatiques inédites, pour des accords mets-vins inédits notamment. Une démarche passionnante, malheureusement menée en quantité confidentielle mais dont nous reparlerons rapidement

Court noué dans le carignan, très vieux, 100 ans. Rameaux se dédouble, beaucoup de bois mais très peu fructifère. Selection massale sans le court noué ou très peu, arraché le reste. laissé reposer, entre 5 et 7 ans (c’est très long le court noué) et replanter.

Barriques majoriatirement 400L. Pas mal d’essai, Rousseau, STockinger, Tonnellerie de Mercurey (comme Mich’, qui aime beaucoup)

Ils font des vins oxydatifs (c’est lhistoire de la région), jamais de mutage par contre masi joue beaucoup sur les oxydations, le rancio.

DEs grenaches à 16, joue avec le ouillage, la (pour gagner en complexité plus qu’en oxydation).

Hyper interessant de discuter avec lui.

Beaucoup de temps est passé à la taille, enormément meme, à reflechir sur les flux de seve, les cones de dessechement, les plaies de taille. Le gobelet est particulièrement adapté pour ça pour lui, car il n’y a de plaies de taille que sur des bois de l’année.

Le gel l’a bien calmé, il fait deux passages comme dans le chablisien, avec des rameaux ou ils les 4-5 yeux. les yeux au extremité sont les premiers a débourrer. Ils servent de fusibles. il repasse en Avril et retaille à 2 yeux. (en coupant directement à deux yeux, il n’y a qu’eu qui peuvent débourrer donc s’il gele, ya plus rien….)