Angela & Hugo

Domaine Obora

Portrait de Hugo Foizel et Angela Quiblier du domaine Obora, en appellation Juliénas dans le Beaujolais

Angela & Hugo

Domaine Obora

Portrait de Hugo Foizel et Angela Quiblier du domaine Obora, en appellation Juliénas dans le Beaujolais

[Acronyme]. Obora c’est l’histoire d’un couple. Hugo, vient de l’Aube et Angela vient du Jura. et c’est la contraction de leur région respective qui donnera naissance au nom de leur domaine (phonétiquement parlant…). Le O central lui est le o du « Bojo », ce superbe Beaujolais viticole où ils ont décidé de s’installer.

[Des CV pas laids]. Angela a obtenu son diplôme d’œnologie à l’Université de Dijon. Son parcours est jalonné d’expériences auprès d’immenses noms du vin, notamment chez Stéphane Tissot, au Domaine d’Auvenay-Leroy en Bourgogne et chez Marie-Thérèse Chappaz en Suisse. C’est lors d’un stage aux Hospices de Beaune qu’elle croise la route de Thibault Liger-Belair, une rencontre qui s’avérera déterminante pour la suite (on y reviendra).

Le parcours d’Hugo n’est pas mal non plus. Comme Angela, il a acquis de l’expérience auprès de vignerons de réputation mondiale : le Domaine Comte Georges de Vogüé et le Domaine de la Romanée-Conti. Comme Angela, Hugo est aussi une « grosse tête ». Il a obtenu un BTS en viticulture/œnologie chez lui en Champagne. Comme Angela, il a poursuivi ses études jusqu’au diplôme national d’œnologue (DNO). Comme Angela, il a choisi l’Université de Dijon pour le faire. La suite, vous la connaissez…

Le Gamay, cépage fondateur d’Obora
Le Gamay, cépage fondateur d’Obora

[Jeunes Pousses deviendront grandes]. L’aventure d’Angela et Hugo dans le Beaujolais commence véritablement en 2019, lorsqu’ils rejoignent le Domaine des Jeunes Pousses. Les Jeunes Pousses, c’est un projet innovant, né de l’amitié entre Thibault Liger-Belair et Ivan Massonnat (Domaine Belargus) qui vise à offrir à de jeunes vignerons talentueux l’opportunité de se lancer dans la production de vin, sans avoir besoin d’apport (financier et matériel). L’objectif du duo est de fournir un domaine de cinq hectares « clef en main » à des néo-vignerons qui sont laissés, à la vigne et à la cave, en totale autonomie. Au bout de 3 ans, il faut laisser sa place à de nouveaux vignerons.

Angela et Hugo ont été les premiers à prendre la gérance de ce Domaine des Jeunes Pousses. Cette expérience leur a permis d’affiner leur style, de comprendre les subtilités des terroirs de la région et de commencer à se faire un nom dans le microcosme viticole français. Elle leur a surtout permis de se rendre compte que, définitivement, leur vie s’écrira dans le Beaujolais

Gamay, encore et toujours

[Cru Méconnu]. Fort de cette expérience enrichissante, le couple décide de voler de ses propres ailes en 2021. Ils créent donc le Domaine Obora, en s’installant majoritairement sur le Cru Chénas, avec une surface de vignes tournant autour de 6 Hectares. Pas le plus connu des dix Crus du Beaujolais, probablement même le plus méconnu avec le tout aussi confidentiel Régnié. Comme (me) l’explique Hugo : “Chénas est un cru qu’on trouve très peu parce qu’une grosse partie de la commune de Chénas a droit à l’appellation Moulin-à-Vent et ‘tout le monde’ préfère mettre Moulin à Vent sur l’étiquette.” Le couple a, avec quelques autres (dont les frères Thillardon dont ils sont d’ailleurs proche) lui fait le choix, plutôt audacieux, de mettre en avant cette appellation méconnue, contribuant ainsi à sa (re)découverte.

Le Village de Chénas. Le Chai et une parcelle d’Angéla et Hugo se cache dans cette photo

[Cuvées]. Sur ce Cru Chénas, Angéla et Hugo possèdent deux grandes unités de terroir. D’un côté, il y a les Pérelles, offrant des sols très granitiques et qui offrent aux vins une épine dorsale plus longiligne et des aromatiques généralement plus «caillouteuses». De l’autre, le climat ‘En Papolet’, beaucoup plus argileux, avec des sols plus profonds et offrant des vins avec plus d’épaule et en général des aromatiques plus immédiates, ou en tout cas plus fruitée. Sur le premier millésime (2022), les deux terroirs ont été assemblés et le couple n’a donc produit qu’une seule cuvée de Chenas. Pour les millésimes suivants, les deux climats sont mis en bouteille séparément

La parcelle de Chénas “Les Boccards” produira à l’avenir surement sa propre cuvée également. Cette parcelle est particulièrement intéressante car elle se situe à la frontière entre Chénas et Juliénas, séparée par une petite vallée où coule une rivière surnommée “La Mauvaise”. Cette rivière marque une véritable différence entre les unités de terroir : d’un côté, le granit de Chénas, de l’autre, les sols plus argileux, plus profonds et plus lourds de Juliénas.

La Parcelle des Boccards, en appellation Chénas

[Cuvées, encore]. Angéla et Hugo revendiquent et veulent porter haut les couleurs de la commune où ils ont leur chai mais ils ne se cantonnent pas au seul Cru Chénas. Sur Juliénas notamment, ils possèdent 60 ares sur le lieu-dit “Les Rizières”, un terroir humide et argileux qui confère aux vins une belle profondeur. C’est également sur ce même type de terroir qu’ils possèdent une petite parcelle de blanc plantée de Chardonnay et d’un peu de Viognier. Elle permet la création de la cuvée Blanc.o.

Leur projet pour cette parcelle est ambitieux : ils souhaitent la complanter rapidement avec de l’Aligoté, du Savagnin (un cépage non négociable pour Angela et ses origines jurassiennes) et du Chardonnay rose, une variété qui offre des jus avec une meilleure acidité que le Chardonnay « classique ». Vous l’avez compris, Angela et Hugo recherche à (re)trouver un peu d’acidité et de fraicheur pour leur blanc (ce qui est, il est vrai, pas la qualité première des blancs du beaujolais en général)

Au premier plan, nous sommes encore à Chenas et en face, c’est Juliénas (les Rizières sont à droite). Le lit de « La Mauvaise » serpente entre les arbres

[BoB]. Je ne vous ai pas parlé de Bob. Bob, c’est le nom d’une cuvée issue d’un petit clos ceint de murs, des vieilles vignes, en appellation Moulin-à-Vent, entièrement travaillées au cheval…Sur le papier, elle aurait tout pour être leur cuvée « haut de gamme », en l’élevant sous bois dans de jolis contenants par exemple… Et pourtant non, c’est le vin le moins cher du domaine et Angela et Hugo le sortent sous l’étiquette Vin de France, simplement parce qu’ils considèrent que les jus ne sont pas les plus intéressants. Et pour le nom, il n’y a pas de signification particulière, c’est juste Bob 🤷‍♂️…Une simplicité, une franchise et, il faut le dire, aussi, une forme d’honnêteté, totalement à l’image du couple, de leur philosophie et de leurs vins.

[Laisse béton]. Ils ont roulé leur bosse dans les plus grands domaines viticoles du monde et pourtant leur approche de la vinification n’est que simplicité (mais efficacité). Tout commence toujours par une macération semi-carbonique, en général elle dure une petite quinzaine de jours. Les raisins passent une nuit en chambre froide auparavant pour démarrer les fermentations sur des « jus » bien frais, une technique qui permet de préserver la fraîcheur et le fruit. La vinification se fait ensuite en cuves béton, un matériau neutre qui respecte l’intégrité du fruit. De part leurs expériences, Angela et Hugo pourraient probablement avoir accès aux meilleurs barriques qui existent en Bourgogne (La DRC et d’Auvenay sont globalement plutôt bien servi chez leurs fournisseurs de fûts respectifs…) mais pourtant, non. La grande majorité des vins sont élevés en cuve béton. « Ça m’intéresse pas trop, moi, le bois…» me dira Angela.

Vinif (studieuse) en cuve béton

[Droit]. Évidemment, il y a cette envie, on le ressent, de rester au plus proche du fruit et du terroir, sans artifice. Les sulfites ne sont, généralement, pas de bons alliés dans cette optique. Généralement…Le couple est particulièrement attentif à l’utilisation du soufre, cherchant à en minimiser l’usage. En général, ils n’ajoutent, au maximum, que 10mg/L de soufre à la mise en bouteille, avec parfois une petite pincée supplémentaire pendant la vinification si nécessaire. Comme le souligne Angela : “L’objectif, dans un monde idéal, c’est de faire du sans soufre total, mais pas à tout prix. Il faut que ça reste droit.”