Gaëlle et Florian Richter

Domaine des Deux Clés

Corbières

portrait de florian richter, du domaine des deux clés, dans les corbieres

Gaëlle et Florian Richter

Domaine des Deux Clés

Corbières

portrait de florian richter, du domaine des deux clés, dans les corbieres

Elle est bourguignonne et oenologue. Il est allemand et fils d’un importateur en vin. Ils se sont rencontrés au début des années 2010 dans la région de Gaëlle où ils travaillent alors tous les deux. Rapidement, ils pensent s’y installer pour y faire leur propre vin. Tout aussi rapidement, ils y renoncent vu le prix des vignes là-bas…Ils partent alors arpenter le monde viticole, avec des expériences en vallée du Rhône (Beaucastel), en Italie et même, en Nouvelle Zélande.

En 2015, ils s’installent finalement à Fontjoncouse, un village de 150 habitants niché au coeur des Hautes Corbières, à 15km à vol d’oiseau de la méditerranée, à mi chemin entre Narbonne et Leucate. Les plus gastronomes connaissent peut être déjà ce hameau dont l’autre point d’attraction est le restaurant de Gilles Goujon, l’Auberge du Vieux Puits (3⭐️). Un petit bourg plutôt très confidentiel et calme mais où, par contre, on peut donc boire et manger de manière très convenable…

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Le petit village de Fontjoncouse

Ils trouvent là-bas de 12 hectares de vignes, conduites en bio depuis 2001. Parfait. Pratiquement que des vieilles vignes, certaines centenaires et un beau panel de cépages du coin. Ils ne travailleront donc ni Pinot ni Chardonnay comme ils l’avaient imaginé initialement mais du Carignan (beaucoup), de la Syrah, les trois Grenaches, du Macabeu, de la Roussanne et un peu de Vermentino. C’est finalement mieux comme ça. Gaëlle et Florian n’ont pratiquement aucun voisin, la très grande majorité des parcelles sont isolées au milieu de la garrigue. Idéal pour travailler au calme, pour la biodiversité et puis surtout, pour ne pas subir les traitements des autres…

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Une parcelle de vieux carignan
Pas là d’hier ceux-là…

Les vignes étaient en bio depuis 15 ans donc mais Gaëlle et Florian ont voulu aller encore plus loin en entamant immédiatement après leur arrivée une conversion vers la biodynamie. Le domaine (et les vins) sont donc désormais certifiés par Demeter. C’était une étape essentielle pour le couple même s’ils n’attachent qu’une importance toute relative à tout l’ésotérisme « gravitant » autour des pratiques biodynamiques. Ils voient plus ces pratiques comme un « bio amélioré», une façon d’aller encore plus loin dans l’attention et le soin portés à leurs vignes. Une façon de mieux appréhender et de s’intégrer dans leur écosystème également

Carignan planté en 1919
Un petit clos de très vieilles vignes

Gaëlle et Florian n’utilisent pratiquement pas le tracteur. Les sols sont très peu travaillés, en général ils laissent le rang enherbé et passe le rotofil si besoin. Sous le rang, lorsqu’ils le travaillent, c’est majoritairement à la main (et donc à la pioche). De même, ils n’ont pas de gros pulvérisateur, ils utilisent des petits pulvé à dos pour les traitements (soufre et cuivre uniquement) et pour toutes les préparations biodynamiques. Ils ont aussi une brouette de pulvérisation (ça va un peu plus vite mais il faut aussi marcher derrière). C’est un sacré boulot pour une surface de 12 hectares ! L’avantage, c’est que les sols ne sont ainsi pas du tout tassés (ce qui est très positif pour la vie du sol) et les traitements sont en général « mieux posés » qu’avec un gros pulvérisateur inter-rang ce qui veut dire que l’on peut utiliser moins de produits. Il faut dire aussi que le couple ne possède pratiquement que des vieilles vignes, non palissées donc et surtout avec des espacements inter-rangs non constants ce qui n’est pas du tout pratique pour le passage du tracteur et le réglage des outils…(Beaucoup) plus de travail mais en contrepartie, les jus obtenus ne sont pas les même non plus !

Le tracteur de Gaëlle et Florian. Clairement pas la dernière génération de machine agricole…

Gaëlle et Florian ont mis du temps à trouver le bon endroit pour s’installer mais en contrepartie, ils ont vraiment trouvé de magnifiques terroirs. Fontjoncouse est situé à 300m d’altitude. Aucune vigne n’est située à moins de 250m d’altitude, là plus haute est 100m plus haut. Les nuits y sont plus fraiches que dans la plaine, un facteur primordial pour obtenir de bonnes maturités tout en préservant les équilibres. Les sols sont également d’une très grande complexité. Ce sont globalement des sols du Trias mais avec une très grande diversité minéralogique. On y retrouve des quartz, des dolomites, des spilites, du travertin…La teneur en argile et en calcaire (plutôt présent sur les plateaux pour ce dernier) varie assez largement en fonction des parcelles. Une géologie très riche, difficile à appréhender mais qui évidemment donnent de la profondeur aux vins

Les origines de Gaëlle refont surface une fois le raisin entré en cave et cela se ressent particulièrement sur les blancs qui sont vraiment vinifiés à la bourguignonne: intégralement sous bois, avec une petite proportion de bois neuf et avec un travail sur les lies important (avec un peu de bâtonnage notamment). Gras et dense, à l’aromatique juste et noble, ils gardent une belle fraicheur. L’ensemble des vins sont vinifiés de manière « traditionnelle » (pas de carbo notamment) mais en levures indigènes. Les rouges sont dans un style ample et charnu, avec des tanins suaves et des vraies maturités mais sans déséquilibre. Ils sont souvent travaillés avec au moins une partie de vendanges entières (sauf le grenache, toujours égrappé). Les élevages mixent cuve inox, béton et barriques, en fonction de la vendange et du style de vin recherché. Les barriques viennent elles aussi de Bourgogne, de provenance très (très) sûre (Damy et Chassin). Ce ne sont pas des ayatollah du sans soufre mais les doses utilisées restent modestes. Sur les derniers millésimes, la cuvée Réserve (leur «grand» vin) présente moins de 30mg/L de sulfites total par exemple, ce qui pourrait même lui autoriser la dénomination « vin méthode nature » s’ils le souhaitaient.