Catherine Bernard


Catherine Bernard


Avant Propos : Catherine Bernard vit sur la commune de Restinclières, à une vingtaine de kilomètres au Nord Est de Montpellier. Aucun des vins proposés par Catherine Bernard est d’Appellation d’Origine Contrôlée. Catherine Bernard produit exclusivement des VSIG, des Vins sans Indication Géographique, plus communément appelés Vins de France qui, par définition et pour être clair, peuvent donc être, au regard de la loi, originaires de n’importe où en France
Histoire
Catherine Bernard a eu deux vies. La première s’est déroulée à Paris, Catherine est alors journaliste pour Libération. Elle voyage pas mal, travaille plus encore, mais se retrouve très souvent en terre languedocienne, où elle finit par devenir correspondante permanente pour le journal.
Catherine aime les mots et son métier, pourtant, elle a déjà cette attirance pour la terre et une petite partie d’elle-même sait déjà qu’un jour, elle la travaillera de ses mains.
La quarantaine est une période d’introspection pour tout le monde. Le sentiment d’être “à la mi-temps”. C’est à ce moment qu’elle se résout à écouter cette petite voie intérieure et change de vie. Elle fera du vin!
Catherine est originaire du Muscadet mais personne dans sa famille n’a de lien particulier avec le dit-breuvage, même si gros plant et melon de bourgogne s’invitent à la table dominicale. Elle passe alors un Brevet Professionnel Agricole option viticulture-oenologie et pendant un an, travaille à mi-temps chez un vigneron. En 2005, c’est finalement le grand saut, Catherine achète 3 hectares de terres, dont 1 de vignes.
Le début d’une aventure qui la conduira, elle et ses vins, aux quatre coins du globe, à nombre de rencontres avec des amoureux du vin et du partage, du simple bistrot aux tables étoilées mais qui l’a surtout poussé à trouver un nouveau langage pour exprimer sa sensibilité. Avec toujours l’amour du beau et des mots, mais cette fois en bouteille.
Les vignes
L’essentiel des vignes de Catherine Bernard est localisé au sein d’un même ilot, situé sur la commune de Saint Drézéry. A l’origine, Catherine pensait acheter 3 hectares, avec une très grosse majorité de grenache complété de mourvèdre. C’est en tout cas ce qui était inscrit sur l’acte de vente. Il s’avère finalement qu’il y avait bien 3 hectares (dont 1 de vignes) mais qu’en fait, presque la moitié du grenache s’est avéré être du marselan…Un “imprévu” qu’elle ne regrette aujourd’hui pas le moins du monde. Tout cet îlot, qui appartenait auparavant au Mas de Martin, s’appelle La Carbonelle.

La carbonelle, c’est un petit mamelon argileux orienté plein sud. De la vigne était déjà plantée à cet endroit au XVIeme siècle mais c’est aussi un lieu où l’on a extrait du charbon dans le passé, d’où le nom donné par Catherine à cette parcelle. L’essentiel des vignes est entouré de bois ou de haies bocagères, que Catherine entretient soigneusement ou (re)plante lorsque c’est nécessaire et qui sont autant de refuges de biodiversité.

Ce mamelon se divise en trois parties de tailles sensiblement équivalentes. La partie en “bas de pente” et la plus à l’est est réservée au grenache. Il s’agit d’une sélection clonale, composée de 3 clones différents greffés sur 3 portes greffes différents, ce qui permet d’apporter un minimum de diversité. Le sol est assez profond, l’argile ressort clairement. Le tout est travaillé en gobelets.

Le mourvèdre et le marselan sont eux palissés. Les hauteurs de palissage sont d’ailleurs très importantes, notamment sur le mourvèdre (au moins 2 mètres). Il s’agit là aussi de sélections clonales. Cet ensemble de vignes (grenache, mourvèdre, marselan) constitue les premières vignes que Catherine a acheté et n’ont donc pas été plantées par elle.

Toujours sur la carbonelle, juste à côté de l’îlot “historique”, Catherine a également fait ses propres plantations. On y retrouve du cinsault ainsi que du terret bourret et du carignan gris. Tous les plants viennent d’une sélection massale de vieilles vignes de chez Didier Barral.

Le cinsault est planté sur le bas de pente, sur un sol plus profond, d’argiles très fines et de sables. Le terret bourret et le carignan gris sont donc sur le haut, sur un sol moins profond, avec un peu moins d’argile. La réserve en eau y est plus faible.


Comme on peut le voir sur les photos (prises début Mars), les vignes sont buttées pour l’hiver. Un décavaillonnage a donc lieu au début du Printemps. Aucun désherbant ni engrais n’est utilisé, tout se fait le plus simplement possible, avec bon sens. La lutte contre l’herbe se fait par un travail du sol mais Catherine n’a pas de tracteur, elle utilise un petit chenillard.

L’utilisation du soufre et du cuivre est réduite à son strict minimum, un gros ébourgeonnage est fait au printemps en prophylaxie, pour bien aérer les grappes et ainsi pouvoir diminuer les quantités de produits de contact utilisées. Catherine ne fait que trois passages par an pour le soufre (certains passent plus de dix fois dans les millésimes compliqués) et ne met plus rien une fois le stade fermeture de grappe passé. Catherine ne rogne pour ainsi dire pas, seul le grenache est légèrement écimé mais elle ne touche ni au marselan ni au mourvèdre (d’où l’intéret d’avoir un beau palissage bien haut). Les manquants de la parcelle “historique” sont replantés en sélections massales. Elles viennent aussi de chez Barral sauf le grenache que Catherine est allée chercher dans le roussillon chez les Gauby.
Du raisin au vin
Depuis l’achat de ses vignes en 2005, Catherine Bernard a changé pas moins de quatre fois de lieu de vinification. Elle a donc longtemps vinifié chez les autres mais en 2015, elle se décide à construire son propre “chai-elle”, sur la commune de Restinclères. Un bâtiment à son image, unique en son genre et qui peut même paraitre déconcertant de prime abord mais qui à y regarder de plus près, démontre une grande réflexion quant à sa construction.

Les caves d’élevage, déjà parfaitement isolées, sont situées en dessous du bâtiment et sont donc partiellement enterrées, ce qui améliore encore leurs inerties thermiques. La partie vinification est située sur le dessus, au “premier” étage, ce qui permet de travailler par gravité. Catherine possède également 3 grands collecteurs d’eau de pluie et ne travaille donc qu’avec l’eau qui lui vient du ciel. Un lieu de création unique, dont Catherine apprécie particulièrement l’énergie (pour reprendre ses mots) qui s’en dégage.

Toutes les vinifications se font en cuve en fibre. Catherine n’aime pas l’inox, elle trouve ça trop froid. Elle n’aime pas non plus les cuves carrées ou aux formes anguleuses. En fait, elle n’imagine pas le vin dans autre chose qu’un contenant arrondi. Après une vendange manuelle et un tri à la parcelle, tous les raisins sont égrappés et fermentent sous levures indigènes. Catherine avait pour habitude de mettre un peu de soufre sur la vendange à ses débuts (une pratique courante, et même systématique pour tout dire, chez les vignerons “conventionnels”) mais ne le fait plus désormais. Fermentations alcoolique et malo-lactique se déroulent dans les mêmes cuves, le vin de presse est également ajouté de suite.


Le vin est ensuite entonné (par gravité donc) en barriques de 228L majoritairement même si une partie de la cuvée La Carbonelle est élevée dans un grand foudre de 20 hl. Tous les fûts sont des fûts d’au moins deux vins, Catherine n’a jamais acheté une seule barrique neuve. Une grande partie du parc de barrique provient du domaine Arlaud (à Morey Saint Denis), ce qui garanti une bonne qualité des bois. L’élevage dure au minimum un an, en général un peu de soufre est ajouté à la mise (entre 1 et 1,5 g/hl) mais Catherine tend là aussi à s’en passer.


Juste un petit mot pour conclure, une anecdote plutôt mais qui montre bien la philosophie de travail de Catherine Bernard et son souci du détail (le grand vin est une somme de détails). Cela concerne le choix des bouchons. Depuis ses débuts, Catherine a toujours fait appel à des “grands” acteurs du secteur, principalement Cork Supply et Amorim (le leader mondial du bouchon liège). Mais ça ne lui plaisait pas. Elle n’était pas satisfaite de la qualité et surtout, pestait contre les revêtements qui sont déposés sur le bouchon (généralement à base de silicone) pour faciliter leur introduction dans le goulot. Elle est donc partie jusqu’au Portugal (le 1er producteur de liège au monde) et s’est mise à la recherche de quelqu’un qui partagerait ses valeurs et qui serait capable de lui faire le produit qu’elle recherche. Après quelques essais pour presque autant de ratés (c’est le lot de l’innovation…), c’est désormais chose faite. Elle collabore maintenant avec Joaquim Duarte, un artisan bouchonnier de Vila da Feira, aussi respectueux du liège, de son origine et de son cycle qu’elle ne l’est de la vigne. Une collaboration plus juste, plus équitable également, pour un produit de meilleure qualité et plus respectueux, à la fois de l’environnement et de celui qui le fabrique. Une “profession de foi” dit-elle.